lundi 30 juin 2014

Recherche de synergies entre management des risques professionnels et management socio-économique. Cas du Document Unique d'une entreprise de stockage frigorifié.




Bonjour, aujourd'hui je vous présente le mémoire que j'ai réalisé au cours de mon année universitaire de master 1 "Management des équipes et qualité" (Centre EUGINOV - IAE Lyon).

Ci dessous vous trouverez un résumé de ce dernier, et le texte en intégralité est disponible ici : Mémoire dans son intégralité (format PDF)






RÉSUMÉ DU MÉMOIRE DE MASTER 1

Management des Équipes et Qualité


ANNÉE UNIVERSITAIRE 2013-2014

Recherche de synergies entre management des risques professionnels et management socio-économique.
Cas du Document Unique d'une entreprise de stockage frigorifié.

Présenté et soutenu par :

Georges CABARET

Le 2 juillet 2014



Introduction 

            Toutes les 15 secondes, 160 travailleurs sont victimes à travers le monde d'un accident lié au travail [1]Le coût humain de cette menace quotidienne est considérable et on estime que le fardeau économique des mauvaises pratiques de sécurité et santé au travail représente, tous les ans, 4% du produit intérieur brut mondial.[2]

            J’ai pu observer lors de mon expérience professionnelle de cette année, en alternance au sein d'une entreprise de stockage frigorifié dans la région lyonnaise, que les méthodes actuelles d'analyse des risques professionnels (seule analyse de risques formalisée dans mon entreprise) ne permettent pas aux décideurs d'évaluer les impacts financiers liés aux dysfonctionnements.
            Il y a d’une part l’obligation réglementaire pour la direction d’analyser les risques d’accidents,  et d’autre part l’intérêt de ne pas avoir une tarification trop élevée des risques d’accidents du travail et des maladies professionnelles par la CNAM [3]. Ces deux objectifs ne prennent cependant pas en compte l’ensemble des coûts supportés par l’entreprise lors d’un accident du travail, comme par exemple la nécessité de remplacement, la baisse de production, etc. Dans ce contexte, comment améliorer les méthodes d'analyse des risques et développer leur utilisation par les acteurs?
            Les principes de la méthode de management socio-économique, développée par Henri Savall et le laboratoire de recherche ISEOR, peuvent permettre d'apporter des éléments de réponses. Cette méthode a pour but d’améliorer la compatibilité des objectifs économiques et des objectifs sociaux des entreprises et organisations. La démonstration repose sur le calcul des coûts et performances visibles et cachés liés à des variables de performances sociales."[4]
            Nous essaierons, à travers ce mémoire, d'étudier l'apport de la prise en compte des coûts et performances cachés dans l'analyse des risques professionnels de mon entreprise, l'impact qu’il peut avoir sur la perception des risques par les acteurs et la valeur ajoutée ou non dans les prises de décisions concernant les actions de maîtrise des risques.

            Notre sujet d'étude se limitera à l'Analyse des risques professionnels (ARP) de cette entreprise, qui est réalisée par le CHSCT et traduite dans le document unique de l'entreprise, sous la responsabilité de l’employeur [5]. À partir de ce matériel « terrain », nous montrerons dans un premier temps les possibles synergies entre management socio-économique et management des risques (voir également l'annexe 1 qui présente mon raisonnement de façon schématique), puis l'actualisation du document unique de l'entreprise avec la prise en compte de l'apport de la théorie socio-économique, avant de proposer un bilan intermédiaire de cette association de méthodes et les possibles pistes de maîtrise des risques qui en découlent.


1. Synergie entre management socio-économique et management des risques professionnels

            Dans cette partie, vous pourrez observer les synergies théoriques entre les deux approches. L'objectif ici étant de valider l'hypothèse d'une association possible entre les deux types de management du point de vue des prérequis.

1.1.  Un contexte commun propice au rapprochement d'idées

            Dans un contexte d'amélioration des conditions de travail, l’approche socio-économique des conditions de vie au travail et le management des risques sont tous les deux des approches  holistiques et intégrantes.

            L’approche socio-économique pose le sujet des conditions de travail et de son amélioration au centre de ses réflexions. Elle propose en effet un modèle "bio-systémique" des organisations, c’est-à-dire une théorie qui prend en compte la dynamique des interactions permanentes entre les structures et les comportements. Ces interactions constituent aussi bien une force nécessaire à la production de biens et de services, qu’une source de dysfonctionnements. L'approche socio-économique propose de classer ces dysfonctionnements en six catégories :
Les dysfonctionnements dus aux conditions de travail,
  • Les dysfonctionnements dus à l’organisation du travail,
  • Les dysfonctionnements dus à la communication-coordination-concertation,
  • Les dysfonctionnements dus à la gestion du temps,
  • Les dysfonctionnements dus à la formation intégrée et
  • Les dysfonctionnements dus à la mise en œuvre de la stratégie.

            Par une relation de causalité, le modèle socio-économique associe les conditions de travail non seulement à un aspect qualitatif ou quantitatif mais également financier.

            Le processus de management des risques peut être résumé, comme proposé par Octave NGUÉNA, dans son ouvrage « Management des risques » en Quatre étapes : Identification, Valorisation Traitement et Suivi des risques (IVTS). Nous voyons bien à travers cette définition, notamment grâce à sa capacité de généralisation à toute étude de risques, le caractère holistique et intégrant de la méthode.
La théorie socio-économique propose quant à elle un processus d’innovation se décomposant en quatre phases, le diagnostic, le projet, la mise en œuvre et l’évaluation.
            Ces deux théories sont aussi convergentes sur la nécessité de placer le facteur humain au coeur de la prise de décision. L'application des principes de la théorie socio-économique requièrt une acceptation du postulat suivant : "le potentiel humain est le seul facteur ACTIF créateur de valeur ajoutée". Cette prérogative est transposable au management des risques, car le passage d'une situation à risques à une situation d'opportunités ne peut se faire que par une évolution de la perception des individus, nécessitant une amélioration des connaissances de la situation. Ainsi, le facteur humain, est le seul facteur actif, par sa capacité d'apprentissage, créateur d'opportunités.

1.2.  La matérialisation des risques

            La plupart des théories et cadres conceptuels concernant les risques se différencient par le vocabulaire utilisé. Suzanne BISAILLON, dans une présentation de 2012 à destination des étudiants de Polytechnique[6], dénombre 269 définitions différentes concernant les termes utilisés en management du risque pour 15 cadres conceptuels recensés. Cette difficulté sémantique est également révélée par l'existence de deux écoles concernant la notion de risque, l'école dite moderniste et l'école dite du "roman nautique"[7]. La confusion autour de la notion de risque et de la notion de danger témoigne de ce malentendu sémantique. Les cindyniques sont la plupart du temps présentés comme les sciences qui étudient les risques. Or ce néologisme, qui a été introduit lors d'un colloque tenu à la Sorbonne en 1987, provient du grec "kíndunos" qui signifie danger.

            Les risques sont des éléments hypothétiques. Mais ils peuvent être objectivés, et le processus de modélisation des risques permet d'améliorer la qualité, voire la quantité, des informations relatives aux risques et donc d'accroître les capacités de prise de décision des acteurs. Les travaux de Thomas Bayes (1702-1761), et notamment la définition du processus de gestion des connaissances (définition et quantification des scénarios de risques), ont été fondamentaux du fait qu'ils ont permis de démontrer que la perception des risques est dépendante de la connaissance.
            On note de plus qu’il existe un certain consensus autour de la "matrice criticité "[8]. Cette dernière est largement utilisée pour cartographier les risques. La cartographie des risques est une représentation synthétique et globale des risques hiérarchisés selon les critères de l'entreprise.
            Un des principes fondamental de la théorie socio-économique est l'analyse des coûts liés aux dysfonctionnements, notamment des coûts cachés [9]. L’analyse des coûts et performances cachés appliquée aux risques est un modèle conditionnel de matérialisation de ces derniers, car cette analyse socio-économique permet d'objectiver une partie des estimations classique des risques (estimation de fréquence de survenance, estimation de la gravité). De plus, un des intérêts à appliquer cette analyse des coûts et performances réside dans sa capacité à améliorer les prévisions, notamment en termes budgétaires, des acteurs de l'entreprise.
            Un autre avantage à associer des estimations de type financier à celles de type qualitatif et quantitatif réside dans la possibilité de tester ("stresser") des hypothèses afin d'identifier un maximum de scénarii avec une fiabilité améliorée.
            Ainsi, le management socio-économique permet d'améliorer la matérialisation des risques.

1.3.  L'importance du retour d'expérience : l'analyse des accidents du travail

            Toute évaluation de risques comporte une forme de subjectivité. Le retour d'expérience doit donc reposer, au maximum, sur des fait tangibles et détaillés pour éviter les erreurs de représentations mentales individuelles comme collectives. Nous nous focaliserons sur les accidents du travail qui sont tracés dans les entreprises. Si ces accidents ont été suffisamment caractérisés et analysés, leur contribution à l'analyse de risques peut être un réel avantage. Ils sont des « écarts » par rapport au fonctionnement souhaité par l'entreprise et un frein à son développement stratégique. Ce sont donc des dysfonctionnements. Le management socio-économique montre que ces écarts proviennent de l'interaction entre les structures de l'entreprise et les comportements humains[10]. La théorie socio-économique a identifié six grandes familles de dysfonctionnements qui ont permis d'identifier cinq catégories principales de coûts cachés, dont les accidents du travail. La théorie socio-économique propose une méthode d'évaluation de ces coûts à travers une évaluation scientifique qui requiert une somme importante d'informations pour pouvoir caractériser et estimer ces coûts.

            Si nous partons de l'axiome qui consiste à ce qu'un risque et un dysfonctionnement sont la même chose mais dans un espace temps différent, constituer une base de donnée des accidents du travail, des "presque-accidents" ou des dysfonctionnements passés, permettrait d'apporter des éléments tangibles afin d'analyser les risques à venir ou les dysfonctionnements futurs.

            En prenant en compte ces éléments, j'ai réalisé un retour d'expérience des accidents du travail l’établissement de Corbas, sur une période de six années, de 2008 à 2013 (annexe 2). Ayant une base de données des accidents du travail constituant un retour d'expérience exploitable, j'ai axé mes efforts sur le document unique. Celui-ci fige, en effet, l'analyse des risques professionnels de toute entreprise, coeur de mon sujet d'étude.

2.   Un instrument obligatoire et central : le Document Unique

            Le document unique est une obligation pour l'employeur (Article R.4121-1 " L'employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l'article L. 4121-3").

2.1. Qu'est-ce qu'un document unique?

            Outre l'obligation législative, le document unique c'est cinq grands principes à respecter : engagement du chef d'entreprise, choix des outils pour l'évaluation, s'organiser pour être autonome dans sa démarche, associer les salariés à la démarche et décider des actions de prévention à mettre en place.

2.2. Le document unique suffisamment efficace : un constat à dresser

            Voilà près de 13 ans que le document unique est instauré en France (décret n° 2001-1016 du 5 novembre 2001) et les résultats concernant l'appropriation et la maîtrise des risques professionnels dans les entreprises, sont à relativiser. On notera néanmoins une évolution importante et bénéfique : l'évaluation des risques professionnels et sa formalisation dans le « document unique » ont considérablement modifié l’approche de la prévention. L’ARP a  contribué à sortir de la logique accident/réparation et à développer la prévention dite « primaire », qui consiste à éviter le risque ou tout au moins à réduire sa probabilité de survenance. En cela, le document unique constitue le socle de la démarche de prévention en entreprise. Toutefois, ces résultats positifs sont à relativiser compte tenu des disparités qui peuvent exister entre TPE/PME et Grandes Entreprises[11]

2.3. De l'instrument obligatoire à l'outil d'aide à la prise de décision

            Encore un certain nombre d'employeurs voient dans l'analyse des risques une obligation plus qu'une opportunité. Par une intégration de la dimension financière à l'évaluation des risques, nous allons voir que l'analyse des risques professionnels peut être source de performance interne dans l'entreprise. Pour ce faire, nous devons suivre les cinq étapes de la  méthodologie testée sur mon cas de recherche (les risques professionnels de l'établissement de Corbas).


Méthodologie utilisée pour estimer la dimension financière des risques professionnels

            La première étape fait intervenir les informations issues du retour d'expérience des accidents du travail. La seconde consiste à faire la jonction entre le retour d'expérience et l'analyse des risques professionnels (les caractérisations des accidents du travail de mon entreprise soulignent les risques qui n'ont pas été maîtrisés et qui sont à l'origine de l'accident. Or ces risques ne sont pas les mêmes que dans le document unique, d'où la nécessité d'harmonisation). C'est au sein de la troisième étape qu’interviennent les principes de la théorie socio-économique pour estimer les coûts liés à un accident du travail. Vous trouverez ci-dessous la synthèse des résultats obtenus sur le périmètre de recherche pour l'année 2013 :

Rubriques
Descriptions
Coût en Euros (2013)
Coûts visibles
Indemnités journalières supportées par l'entreprise
9070,53 €
Coûts liés aux remplacements
16090,59 €
Coûts cachés
Coûts liés à la non production
94521,13 €
Coûts liés à la caractérisation et à la déclaration de l'AT
3997,28 €
Coût total
123679,55 €
Coût d'un jour d'AT
446,50 €
Évaluation des coûts des accidents du travail en 2013 (établissement de Corbas)

            L'étape 4 consiste à pondérer économiquement chaque catégorie d'accident de travail, et pour ce faire, nous confrontons les informations issues du retour d'expérience, qui nous donnent la moyenne de jours de travail perdus par catégorie d'accidents du travail sur une période de six ans, et le coût "complet" d'un jour d'accident du travail. Prenons un exemple, les accidents du travail dus aux chutes/dénivellations. Le retour d'expérience nous informe que sur la période de 2008 à 2013, le nombre de jours de travail perdus en moyenne par an est de 22,375 jours. Nous savons désormais qu'un jour d'accident du travail représente un coût de 446,50€, il nous suffit donc de multiplier ces deux données pour connaître le coût de la famille "chute/dénivellation". Il est ici de 9990,36€ (22,375 x 446,50). Ce montant, grâce à la deuxième étape peut être associé à certains risques identifiés dans le document unique. Il est alors considéré comme le coût de survenance des risques en question. Pour être clair, le risque "1.1.1. Chute de plain-pied" (document unique) peut entraîner un accident du travail catégorisé "chute/dénivellation", et donc coûter, selon notre estimation, 9990,36€. La dernière étape de la méthodologie que j'ai utilisée consiste à calculer le coût de maîtrise de chaque risque professionnel. Pour cette étape, nous faisons intervenir une information pas encore utilisée : le coefficient de réduction des risques. Ce coefficient attribué à chaque risque professionnel par consensus du CHSCT permet de connaître le niveau de maîtrise actuel de chaque risque. Elle se concrétise par une échelle d'évaluation de la réduction du risque[12]. Prenons le même exemple que précédemment pour illustrer cette étape : le risque "1.1.1. Chute de plain-pied" correspond à un coût de survenance de 9990,36€ et son coefficient de réduction est de 75%. Pour que ce risque devienne tolérable[13], il reste 25% de réduction à gagner (fiabiliser et systématiser les systèmes de protection des chutes). Le coût de maîtrise est ici de 25% des 9990,36€, soit 2497,59€.
           
            Ainsi, les risques identifiés dans le document unique de mon entreprise sont caractérisés par la fréquence, et le rapport entre le coût de survenance et le coût de maîtrise (principe de l'Analyse Coût/Bénéfice [14] permettant de prioriser les actions de maîtrise des risques). Dans l'exemple précédent du risque "1.1.1. Chute de plain-pied", l'entreprise peut investir 7 492,77€ tout en étant dans une situation d'optimisation financière. Toutefois, il est reconnu que certaines actions de maîtrise des risques ne sont pas "économiquement rentables" mais qu’elles sont "socialement nécessaires" voir "éthiquement indispensables". Il en est ainsi pour certains risques professionnels tels que le risque lié à l'utilisation de produit dangereux pour l'Homme. Dans ce cas, l'entreprise doit pouvoir financier la réduction du risque quel que soit le prix.

3.   Performance interne et maîtrise des risques : levier de croissance durable

            Pour respecter les obligations législatives (article L 230-2 du code du travail), l'employeur a tout intérêt à mettre en place un programme de maîtrise des risques professionnels.

3.1. Programme de maîtrise des risques professionnels : entre protection et prévention

            Le programme de maîtrise des risques doit comporter deux familles d'actions : les actions de prévention, qui agissent sur la fréquence des risques, et les actions de protection, qui agissent sur la gravité de ces mêmes risques. Une des premières pratiques à mettre en œuvre à travers le programme de maîtrise des risques pour assurer l'adéquation avec la politique générale de l'entreprise et l'organisation déjà en place est de réaliser un diagnostic. Pour ce faire, et c'est ce que je vais recommander dans mon entreprise, nous pouvons utiliser la grille d'auto-analyse "Gestion de la santé et de la sécurité au travail dans l'entreprise"[15], outil informatique proposé gratuitement par l'INRS.
            De plus, pour répondre au besoin de sécurité [16] des acteurs, l'ensemble des acteurs de la maîtrise des risques professionnels doivent augmenter leurs connaissances en prévention. L'INRS propose pour cela une autoformation à distance de 20h en quatre modules[17], prise à sa charge, qui peut être réalisée sur le lieu de travail comme à distance. L'objectif de cette autoformation est d'acquérir des connaissances de base en santé et sécurité au travail et de s'initier aux méthodes indispensables pour participer activement à l'analyse des risques professionnels. Cette "mise à niveau" permettrait un gain de temps et d'efficacité dans la mise en œuvre des actions de maîtrise des risques. De plus, il serait judicieux de constituer une base de données de documents spécifiques aux risques identifiés dans le document unique, permettant, de façon rapide (en réunion par exemple), d'avoir accès à des connaissances scientifiques fiables permettant de prendre des décisions fondées.

Le travail d'identification, de hiérarchisation et de prévention des risques est similaire à une colonne vertébrale. Nous proposons ci-dessous une illustration de l'articulation de la prévention, avec en rouge les vertèbres actuellement manquantes de l'entreprise où je travaille (document sécurité) et en vert celles existantes :
            Nous voyons assez rapidement que cette entreprise à une attitude scoliotique. La prescription pour éviter que le diagnostic s'aggrave est simple : développer les vertèbres manquantes (documents inexistants) pour avoir un dos droit (maîtrise des risques assurée). Concernant les risques professionnels, il ne faut pas seulement se limiter à des actions de préventions, mais mettre en place des dispositifs de protection pour agir sur le facteur gravité. Cela consiste à mettre en place des barrières tout le long du scénario de risque aussi bien sur les évènements que sur leurs enchaînements.

3.2. L'apport du management socio-économique au programme de maîtrise des risques professionnels

            Certains indicateurs et outils du management socio-économique peuvent idéalement intégrer le programme de maîtrise des risques et participer à la réalisation d'actions préventives, curatives et correctives. Nous pouvons préconiser la méthodologie du projet d'innovation socio-économique pour une application du CHSCT. Ce type de projet permettrait de développer la communication-coordination-concertation (3C)[18] au sein du CHSCT. Nous pouvons également faire intervenir la grille de compétences au sein du CHSCT, afin de visualiser les compétences de façon synoptique, d'analyser la polyvalence et de détecter les vulnérabilités de compétences pour chaque domaine[19]. L'utilisation de cet outil socio-économique nous permettrait d'identifier également, avec précision, le besoin de formation en santé, sécurité et conditions de travail. Enfin, la remontée en Comité de Direction pourrait être assurée par un tableau de bord de pilotage stratégique. Appliqué au management des risques professionnels, il comporterait des indicateurs de suivi de l'évaluation des risques, indicateurs quantitatifs (nombre de nouveaux risques identifiés, nombre de risques bruts, résiduels), indicateurs qualitatifs (évolution de l'aversion au risques) et financiers (évolutions des coûts de survenances, de maîtrise et montant de l'ACB pour chaque risque ou famille de risques, balances économiques des projet d'innovation du CHSCT).

3.3. Des résultats socio-économiques

De plus, la rencontre du management des risques avec le management socio-économique peut renforcer voir accentuer la cohérence de l'entreprise et des acteurs avec les principes de l'ISO 9001 (voir également l'annexe 3). Les décisions efficaces se fondent sur l'analyse de données précises et d'informations pertinentes, ce qui est garanti par une analyse des dysfonctionnements et des risques (Principe de l'approche factuelle pour la prise de décision). L’humain constitue, à tous niveaux, l'essence de toute entreprise. Une forte implication de sa part permet d'utiliser ses aptitudes au profit de l'organisme. Là encore, les deux processus placent en exergue le facteur humain dans la création de valeur ajoutée (Principe de l'implication du personnel).
La capacité de l’entreprise à remettre périodiquement en question ses pratiques pour gagner en efficacité, sans jamais dégrader les modes de fonctionnement dont elle est satisfaite, est d'avantage assurée. Cette remise en question peut tout à fait prendre l'aspect d'une analyse de risques. Les modes de fonctionnement dont l'entreprise est satisfaite seront préservés et intégrés au mangement socio-économique à travers les projets d'innovation (Principe de l'amélioration continue).

Conclusion

            La synergie entre les management des risques et management socio-économique permet-elle d'améliorer la perception des risques et donc la prise de décision? Nous pouvons répondre suite à ce mémoire que l'apport réciproque d'informations nouvelles que génère l'association des principes de coûts et performances cachés aux principes de risques et opportunité professionnels, permet d'améliorer les « savoirs » des acteurs, et donc agit sur leur perception des risques. La prise de décision en sera alors améliorée, car davantage fondée sur des éléments mesurables (rationnels).

Annexes

Annexe 1 : carte heuristique ou "mind map"


Annexe 2 : retour d'expérience : accidents du travail  - 2008 à 2013


Annexe 3 : relations cycliques des processus d'amélioration continue, de management des risques professionnels (IVTS) et d'innovation socio-économique






[1 et 2] Organisation Internationale du Travail (OIT) : http://www.ilo.org/global/topics/safety-and-health-at-work/lang--fr/index.htm

[3]Site de l'assurance maladie (http://www.risquesprofessionnels.ameli.fr/statistiques-et-analyse/sinistralite-atmp.html) : Arrêté du 20 décembre 2013 modifiant l’arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d’accidents du travail et des maladies professionnelles et fixant les tarifs des cotisations d’accidents du travail et de maladies professionnelles des activités professionnelles relevant du régime général de la sécurité sociale pour 2014 - Entreposage frigorifique. Code risque 63.1DA 4,10
[4] Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet, Libérer les performances cachées des entreprises par un management socio-économique, BIT et ISEOR, 2008 (1ère édition en 2000), page 168
[5] Site de l'INRS (http://www.inrs.fr/accueil/demarche/role.html) : "L’employeur est seul responsable de l’élaboration de ce document, même s’il en confie la réalisation à un chargé de sécurité ou à toute autre personne qu’il estime compétente pour le faire. Les représentants du personnel, le service de santé au travail ou tout organisme (de conseil, de formation…) peuvent être sollicités pour aider à la réalisation du document unique."
[6] Suzanne Bisaillon "Cadre théorique de la gestion des risques. Des principes à l’application" présentation du 8 novembre 2012. Lien : http://medias.irsst.qc.ca/videos/1211_sc_co_HD_applicationTravail_pdf.pdf
[7] André Lannoy, "Maîtrise des risques et sûreté de fonctionnement : Repères historiques et méthodologiques". Tec & Doc Lavoisier, Sciences du risque et du danger, janvier 2008, p.2
[8] Criticité des risques : Facteur de vraisemblance donnant au risque une intensité plus ou moins grande. Selon certaines méthodologies, la criticité est le produit de la probabilité par l'impact du risque. Source : Trajectoire vers un Entreprise Risk Management, Collection Maitrise des risques, AMRAE, janvier 2012, p 120.
[9] Coût caché : coût qui ne sont pas repérés dans les systèmes d'information dont s'est dotée une entreprise, tels que budget, compte de résultat, comptabilité générale, comptabilité analytique, tableau de bord. H.SAVALL, V.ZARDET, M.BONNET "Maitriser les coûts et performances cachés", Édition Economica, 2010, p 123.
[10] Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet, Libérer les performances cachées des entreprises par un management socio-économique, BIT/ISEOR, 2ème édition actualisée, juin 2008, p164
[11] Voir les différentes enquêtes des Associations Régionales pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ARACT) et des observatoires Régionaux de la Santé au Travail (ORST) montre que le document unique n'est pas toujours appliqué, et quand il est, il est n'est pas toujours exploité de façon à dégager une valeur ajoutée.
[12] Echelles d'évaluation : Outil de cotation qualitative des risques permettant d'en obtenir un classement et d'identifier des zones de risques essentielles. Cette cotation porte sur la fréquence, la gravité et parfois la maîtrise estimée du risque. Source : Trajectoire vers un Entreprise Risk Management, Collection Maitrise des risques, AMRAE, janvier 2012, p 120
[13] Risque tolérable : Risque accepté dans un certain contexte, selon des valeurs admises. Source : guide ISO/CEI 73 " Management du risque - Vocabulaire - Lignes directrices pour l'utilisation dans les normes"
[14] L'ACB est définie par Drummond comme la méthode qui permet le calcul en termes monétaires des coûts et des résultats de chaque action alternative. Elle permet une estimation de la valeur des ressources dépensées par chaque programme en comparaison avec celle des ressources qui pourraient être économisées ou créées. Drummond MF, O’Brien BJ, Stoddart GL, Torrance GW. "Methods for the Economic Evaluation of Health Care Programmes". Oxford: Oxford University Press; 2005. Cité dans : Antonopoulou Lila et Targoutzidis Antonis, "Évaluation économique de la prévention pour la santé et la sécurité́ au travail : la pertinence de l'analyse coût-bénéfice", Santé Publique, 2010/1 Vol. 22, p. 23-35.
[15] La grille GPSST de l'INRS est disponible à l'adresse suivante: http://www.inrs.fr/accueil/produits/mediatheque/doc/outils.html?refINRS=outil35
[16] Le besoin de sécurité consiste à se protéger contre les différents dangers qui nous menacent. Il s’agit donc d’un besoin de conservation d’un existant, d’un acquis. Il s’inscrit dans une dimension temporelle. Maslow, A. H. "A theory of human motivation". Psychological Review,1943, 370-396
[17] Module 1 : les bases en prévention
  - Enjeux et valeurs, acteurs internes et externes, accidents du travail et maladies professionnelles, risques professionnels 
- Module 2 : initiation à l'évaluation des risques professionnels
  - Objectifs, méthodologie, identification et classement des risques - Module 3 : initiation à une méthode d'analyse d'accident
  - Faits et opinions, recherche et examen des faits, mise en ordre des causes, recherche de solutions - Module 4 : initiation à l'analyse d'une situation de travail
  - Notions de base en ergonomie, méthodologie d'analyse, charge physique et mentale. Lien vers l'autoformation : https://www.ead-inrs.com/spip.php?page=rubrique-contenu&id_rubrique=143&form=0
[18] Définition des 3C : ils font référence à trois niveaux d'échanges d'informations au sein des organisations. La communication concerne tout type d'échange d'informations à caractère professionnel ou non. La coordination est centrée sur les échanges à caractère professionnel dans le but de réaliser une activité donnée. La concertation signifie que les acteurs se sont mis d'accord pour réaliser un objectif de manière synchronisée. Source : Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet, "Libérer les performances cachées des entreprises par un management socio-économique", BIT/ISEOR, 2ème édition actualisée, juin 2008, p163
[19] Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet, "Libérer les performances cachées des entreprises par un management socio-économique", BIT/ISEOR, 2ème édition actualisée, juin 2008, p164

Citation semaine 27


"Je travaille à être heureux : c'est le plus beau des métiers".


Robert Lassus (1930-2004)

dimanche 22 juin 2014

Citation semaine 26


Les conditions de travail des Européens se sont dégradées au cours des 5 dernières années.




Voir article publié le 22 mai 2014 sur le site d'EUROGIG


La Commission européenne publie les résultats d'une enquête sur les conditions de travail
des Européens et sur l'impact que la crise économique a pu avoir sur celles-ci.

L'enquête a été réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 26 500 actifs européens. Elle révèle une détérioration générale des conditions de travail ainsi que de grandes disparités en matière de satisfaction des travailleurs selon les pays.

La plupart des travailleurs se disent satisfaits de leurs conditions de travail (77% en moyenne dans l'UE) et de la santé et la sécurité au travail (85%). Plus de 80% des personnes interrogées au Luxembourg, en Finlande et aux Pays-Bas estiment que leurs conditions de travail sont bonnes. Viennent ensuite l'Autriche, la Belgique, le Royaume-Uni et l'Estonie.

Mais bien que globalement les Européens se disent satisfaits, la majorité d'entre eux (57%) déplore une dégradation générale de leurs conditions de travail sur les 5 dernières années. La dégradation concerne surtout la France (62%), Chypre et la Hongrie (75%), le Portugal (78%), la Slovénie (84%), l'Italie (85%), l'Espagne (86%) et la Grèce (88%).

Selon la Commission européenne, les résultats de l'enquête montrent que des améliorations doivent être apportées dans les domaines suivants :

  • la prévention du stress,
  • l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée,
  • la prévention de risques liés aux nanotechnologies et biotechnologies 
  • la prévention des TMS. 

Consulter les résultats de l'enquête (en anglais)    



lundi 16 juin 2014

Citation semaine 25

"L'homme et sa sécurité doivent constituer la première préoccupation de toute aventure technologique."

Albert EINSTEIN (1879 - 1955)